Recours contre l’avis d’inaptitude et reprise du versement du salaire

Les différentes réformes intervenues depuis 2016 ont donné la faculté, à l’employeur comme au salarié, de contester l’avis d’inaptitude dans les 15 jours suivant son rendu, devant le Conseil de prud’hommes (C. trav. Art. L4624-7).

Depuis que cette possibilité de contestation existe, la Cour de cassation n’a pas eu l’occasion de se positionner sur l’articulation entre ce recours contre l’avis d’inaptitude et la reprise du versement du salaire prévue à l’article L. 1226-4 du Code du travail.

En effet, selon l’article précité, lorsqu’un salarié est déclaré inapte par le médecin du travail, l’employeur a un mois pour procéder à son reclassement ou à son licenciement : si passé ce délai, le salarié n’est pas reclassé/licencié, l’employeur doit alors reprendre le versement du salaire.

Dans une affaire du 20 janvier 2024, un employeur avait contesté l’avis d’inaptitude dans le délai requis, ce qui avait entraîné la prononciation d’une mesure d’instruction par la juridiction prud’homale : la désignation d’un médecin inspecteur en vue de la réalisation d’une expertise.

Le médecin inspecteur, 8 mois après la déclaration d’inaptitude, avait fini par confirmer l’avis initial. Dans cet intervalle, l’employeur n’avait jamais repris le versement du salaire, tout en n’ayant jamais reclassé ou licencié le salarié.

La Cour de cassation, saisie de l’affaire, a confirmé que le recours exercé contre l’avis d’inaptitude ne suspend pas le délai d’un mois à l’échéance duquel l’employeur doit reprendre le versement du salaire, et, par conséquent, que le salarié a droit au rappel de salaire correspondant.

Cet arrêt a aussi été l’occasion pour la Cour de cassation d’écarter l’argumentation de l’employeur qui considérait que le médecin inspecteur, de par son statut, n’était pas impartial. La Cour rappelle que le Code du travail prévoit un mécanisme de récusation du médecin inspecteur (R. 4624-45-2) et que l’employeur peut toujours mandater un médecin pour prendre connaissance des éléments médicaux.

 

La Cour rappelle également que la jurisprudence de la CEDH ne soumet pas l’expert devant être entendu aux mêmes critères d’indépendance que pour la juridiction (CEDH, arrêt du 5 juillet 2007, Sara Lind Eggertsdóttir c. Iceland, n° 31930/04, § 47). Dès lors, le droit à un procès équitable (article 6 §1 de la CEDH), devant un tribunal indépendant, a bien été respecté.

Cass. Soc. 10 janvier 2024 n° 22-13.464

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